Immobilier

Immobilier LMNP : Un Big Bang Fiscal en Préparation

La réforme fiscale 2024 cible le régime LMNP, menaçant ses avantages pour les investisseurs immobiliers. Ce changement pourrait réduire la rentabilité locative et décourager l'investissement dans l'immobilier meublé, aggravant la crise du logement en France.

L'immobilier est la classe d’actif d’investissement préférée des français, bien quetout aussi détestés par notre président de la République !

 

Or, l'immobilier en France est à un tournant décisif. 

Cela fait plusieurs mois que l’Assemblée Nationale, en la personne de la députée Renaissance Annaïg Le Meur, s’attelle à une réforme majeure des revenus immobiliers, notamment du régime fiscal LMNP.

Cela fait de nombreuses années que le statut LMNP est sous le viseur du régulateur sans qu’aucune mesure concrète ne soit adoptée.

Mais depuis plusieurs mois, la réforme fiscale envisagée par la députée du parti présidentiel suscite de vives discussions, et pour cause. 

Le régime LMNP, jusqu'à présent très avantageux pour les investisseurs, est sur la sellette. 

La loi de finances 2024 marque déjà le début de ce bouleversement en tapant sur le régime LMNP imposé au micro-BIC, et les perspectives pour les années à venir ne sont pas rassurantes pour les investisseurs. 

Que cache réellement cette réforme ? 

Quel sera son impact sur le marché immobilier et sur les investisseurs immobiliers ? 

Une Réforme Fiscale Choc

Cela ne fait aucun doute, l'immobilier est un pilier fondamental de l'investissement en France, bien que notre cher Président ne le porte pas haut dans son cœur.

Emmanuel Macron est souvent perçu comme ayant une aversion pour l’immobilier.

Déjà, en 2017, en pleine campagne présidentielle, il qualifiait l’immobilier de “rente”, indiquant que la possession de biens immobiliers génère des revenus passifs importants sans véritable effort de la part des propriétaires, contrairement à d’autres formes d’investissement plus productives pour l’économie. C’est d’ailleurs cette vision qui a été un facteur clé dans sa décision de transformer l’Impôt de Solidarité sur la Fortune en Impôt sur la Fortune Immobilière.

À cela s’ajoute également, la hausse à prévoir de la taxe foncière d'ici à 2028 avec la révision des valeurs locatives, sans compter les différentes hausses de taxe foncière qui sont venues gommer en tout ou partie la suppression de la taxe d’habitation.

En prenant en compte ces considérations, on comprend mieux pourquoi l’immobilier est en ligne de mire, si l’on met évidemment de côté le fait que nous nous trouvons actuellement dans un pays en quasi-faillite, avec une dette abyssale qui ne cesse de croître et un déficit public qui ne fait que se creuser et qu’il est nécessaire de chercher de l’argent par tous les moyens.

Or, si choisir un bien immobilier n’est déjà pas de tout repos, opter pour le bon régime fiscal, adapté à sa situation, est indispensable pour mener à bien son projet.

Jusqu’à présent, opter pour la Location Meublée Non Professionnelle au réel était de mise chez les investisseurs pour de nombreuses raisons afin, notamment, de maximiser la performance de son investissement tout en répondant à une demande grandissante de logements équipés de la part des locataires.

Mais cet avantageux régime fiscal des locations meublées est voué à être raboté.

Un rapport choc proposant une réforme de la fiscalité locative vient d’être remis au Premier ministre et devrait aboutir à un texte cet automne, en plus de l’adoption d’une autre proposition de loi dont le parcours législatif est déjà bien entamé.

Pour rappel, le régime LMNP permet aux propriétaires de louer des biens meublés avec des avantages fiscaux intéressants, particulièrement grâce au régime réel d’imposition. 

En pratique, ce régime qui a été créé pour encourager l’investissement locatif en proposant une fiscalité attractive, permet de déduire de ses revenus locatifs ne nombreuses charges liées au bien comme certains travaux, les intérêts d’emprunt, les frais de gestion, et surtout, d'amortir le bien immobilier ainsi que le mobilier, ce qui réduit considérablement l’imposition sur les revenus locatifs par rapports aux alternatives telles que son alternative au micro-BIC ou encore l’imposition au foncier qu’il s’agisse du micro-foncier ou du réel.

Prenons un exemple concret pour bien comprendre les effets avant et après la réforme, si elle venait à s’appliquer.

Avant la réforme, supposons un investisseur qui achète un appartement à 100 000 € et qui y ajoute 10 000 € de meubles et le loue 10 000 € à l’année. 

L’expert-comptable calcule que l’amortissement du bien est possible sur 20 ans soit une déduction 5 000 € par an. 

Les meubles sont amortis sur 5 ans soit 2 000 € par an et 500 € d’intérêts d’emprunt du crédit sont remboursés au cours de l’année ainsi que 1 000 € de taxe foncière. 

Grâce au régime réel, il sera imposé sur une base de 10 000€ de loyers – 5 000€ d’amortissement du bien immobilier –  2 000€ d’amortissement des meubles – 1 000€ de taxe foncière – 500€ d’intérêts d’emprunt, soit 1 500 € après déduction de 8 500€ de charges.

Le fisc calculera l’impôt sur les loyers imposables, donc sur une base de 1 500 €. 

On impute bien les charges déductibles ET l’amortissement pour trouver les loyers imposables.

Donc, si on suppose que la tranche d’imposition de notre investisseur est de 30%, il va payer les prélèvements sociaux de 17,20% sur 1 500€, soit 258€ auxquels s’ajoutent les 30% d’impôt sur le revenu sur 1 500€, soit 450€.

Au total, l’investisseur sera taxé à hauteur de 708€.

À cela s’ajoute également le fait que ces amortissements ne sont pas réintégrés au moment de la revente du bien. Autrement dit, cela a pour effet de réduire le montant de plus-value réelle taxable.

Or, la réforme envisagée souhaite apporter des modifications importantes qui vont impacter directement ce régime en supprimant le régime réel d’imposition pour les LMNP.

Après la réforme, on reprend exactement les mêmes hypothèses à la différence près qu’il n’est plus possible de déduire l’amortissement des meubles et du bien immobilier.

La base d’imposition serait désormais de 10 000€ de loyers – 1 000€ de taxe foncière – 500€ d’intérêts d’emprunt, soit 8 500 € après déduction de 1 500€ de charges.

Le fisc calculera l’impôt sur les loyers imposables, donc sur une base de 8 500 €. 

Donc, si on suppose que la tranche d’imposition de notre investisseur est toujours de 30%, il va payer les prélèvements sociaux de 17,20% sur 8 500€, soit 1 465€ auxquels s’ajoutent les 30% d’impôt sur le revenu sur 8 500€, soit 2 550€.

Au total, l’investisseur sera taxé à hauteur de 4 015€.

On voit donc que le montant de la taxation s’envole et, désormais, l’investisseur n’a pas d’autre choix que d’opter pour le régime du micro-BIC qui serait également réformé avec un abattement forfaitaire allant de 30% à 40% selon que la location est de courte ou de longue durée, au lieu des 50% pratiqués autrefois.

Cela signifie que l’on va venir réduire de 40% les 10 000€ de loyers, s’il s’agit d’une location longue durée, et le fisc calculera l’impôt une base de 6 000€.

Autrement dit, l’investisseur paiera 17,20% de prélèvements sociaux sur 6 000€, soit 1 032€ auxquels s’ajoutent les 30% d’impôt sur le revenu sur 6 000€, soit 1 800€.

Au total, l’investisseur sera taxé à hauteur de 2 832€. Un montant certes plus faible que le régime réel réformé, mais une fiscalité qui reste toujours beaucoup plus élevée que l’ancien régime.

On observe donc une augmentation significative des impôts, passant de 708€ à 2 832€, soit une multiplication par 4 du montant d’impôt payé et ce, à en partant du principe qu’il ne s’agit pas de la location courte durée ! Cela montre clairement l’impact financier négatif que cette réforme pourrait avoir sur les investisseurs, les décourageant potentiellement de continuer à investir dans l'immobilier locatif.

D’autres scénarios sont également envisagés et l’on pourrait y dédier une vidéo à part entière pour présenter les différents calculs tant il y a à dire.

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Une réforme plus que bancale

La députée, à l’origine de ce rapport, justifie cette réforme par plusieurs motivations, outre la volonté de simplifier le système fiscal et à réduire les abus.

Si ce rapport est critiquable en de nombreux aspects, il faut reconnaître que certains points sont intéressants et bien appréhendés, en particulier, le fait que le régime du LMNP au réel est une niche fiscale très favorable, notamment au moment de la revente du bien acheté avec plus-value et la non-réintégration des amortissements.

Ensuite, le rapport comporte de nombreuses informations statistiques intéressantes.

Mais les points négatifs sont nombreux et les justifications fausses.

Cette réforme aurait pour vocation de lutter contre la spéculation immobilière, qui contribuerait à la hausse des prix et à la crise du logement, à harmoniser les régimes fiscaux et optimiser les recettes fiscales de l'État.

Deux grandes idées ressortent du rapport : 

1° D’abord l’idée fausse que la location meublée réduit l'offre de logement à louer en résidence principale. En principal argument, le fait qu’il y a de plus en plus de logements meublés au détriment des logements vides.

S'il est vrai que la location meublée s'est très développée au cours des dernières années, cela n'a pas eu pour effet, contrairement à ce que croit la députée, de réduire l'offre de location immobilière longue durée.

En effet, pour qu’un tel phénomène s’observe, il faudrait que dans le même temps, la part des logements en résidence secondaire et occasionnel augmentent au détriment des résidences principales, ce qui n’est clairement pas le cas. 

En réalité, ce que l’on observe, c’est qu’il y a eu principalement un report de la location nue longue durée vers la location meublée longue durée, pour des raisons principalement fiscales. 

Si ce phénomène a pu parfois obliger des locataires qui cherchaient plutôt une location nue à accepter une location meublée, ce report vers la location meublée n'a pas eu pour effet de réduire l'offre de location longue durée.

En fait, c'est l'inverse, si les propriétaires avaient été privés du régime fiscal favorable de la location meublée, ils auraient sans doute, pour nombre d'entre eux, abandonné tout investissement locatif.

C'est précisément parce que le régime fiscal de la location meublée est intéressant que de nombreux investisseurs ont choisi de placer des fonds dans l'immobilier locatif.

Sans compter le fait qu’il est faux de penser, comme le rapport tend à faire croire, que la location meublée est peu recherchée par les locataires, hormis quelques étudiants et célibataires.

Les gens sont de moins en moins attachés à leurs meubles, et même en location nue, de plus en plus de propriétaires proposent la cuisine équipée.

Si on supprime ce régime, les investisseurs vont préférer l'investissement en bourse ou dans l'immobilier à l'étranger. Une nouvelle mesure qui, remplie de bonnes intentions, risquerait de porter atteinte au défi que pose la rénovation du parc de logements avec la mise en place du nouveau DPE. 

Autrement dit, une fois de plus, nos élites, remplies de bonnes intentions, brillent d’incohérence.

2° Ensuite, la croyance, dure comme fer, que les difficultés de logement dans les zones tendues, et notamment en région parisienne, résultent du développement du meublé de tourisme et du grand méchant Airbnb, entrainant le surenchérissement du coût du logement pour les habitants à l'année.

S’il est évident que certains investisseurs ont pu être attirés par la possibilité de faire de la location meublée touristique dans les zones tendues, avec une forte rentabilité, l’augmentation du prix de l'immobilier dans ces zones a une cause tout autre : un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements.

D’abord, la part de résidences principales dans l’agglomération de paris est restée stable depuis 20 ans.

Ensuite, s’il est vrai que la part de résidences secondaires et de logements occasionnels ont connu une croissance,

elle s’explique, entre autres, par une diminution du nombre de logements vacants et la construction de nouveaux logements.

En réalité, la raison est que ces zones touristiques attirent de plus en plus de gens qui veulent y habiter, en résidence principale ou en résidence secondaire. Donc les prix montent.

Tandis que la population en Île-de-France évolue parallèlement avec la population française,

elle évolue plus vite que le parc de logements : 

Cela s’explique en grande partie par un élément clé, souvent négligé par les décideurs et autres analystes : les ménages.

En réalité, si se focaliser sur l’évolution de la population est déjà un bon début, il limite grandement l’analyse et les conclusions susceptibles d’en ressortir.

Ce que l’on observe depuis maintenant de nombreuses décennies, c’est la diminution constante de la taille moyenne des ménages. Tandis qu’en 1968, un ménage était composé d’environ 3,08 personnes, en 2020 un ménage n’était composé plus que de 2,17 personnes. 

 

Ce phénomène est exacerbé du côté de Paris avec 1,86 personne, ville où la taille moyenne des ménages est la plus faible de france,

et où plus de la moitié des habitants vivent seuls, ce qui se traduit par une envolée du nombre de ménages :

Ce phénomène récent qui touche la côte Atlantique existe depuis longtemps à Paris et sur la Côte d'Azur : quand les prix de l'immobilier montent, il est plus difficile et coûteux de se loger.

La réforme du régime fiscal du meublé ne changera évidemment rien à la capacité qu’auront les habitants à l'année de se loger plus facilement.

L'idée que la réforme proposée va également simplifier la réglementation fiscale est tout aussi farfelue, notamment quand on prend en compte le chaos fiscal de la location meublée de tourisme ces derniers mois.

Pour rappel, pour les personnes qui n’auraient pas suivi l’évolution de la fiscalité de ce régime suite, notamment, au vacarme des élections législatives, lors de l'élaboration de la loi de finances 2024, une disposition soutenue par l'opposition, réduisait l'avantage fiscal des locations saisonnières à 30% contre 71% pour les meublés de tourisme classés et 50% pour les meublés de tourisme non classés auparavant.

Mais, lors de l’adoption du budget 2024 par usage de l’article 49 alinéa 3, la réforme de l’abattement fiscal est conservée par erreur. Pris de court, Bercy publie le 14 février 2024 une instruction qui suspend la réforme. Les loueurs étaient alors autorisés à conserver les niches fiscales en vigueur les années précédentes dans leur déclaration de revenus 2023. 

Décision qui a finalement été annulée par le Conseil d’État, le 8 juillet dernier …

En conséquence, une chose est sûre, la période qui se prépare est un véritable big bang fiscal rempli de désordre qui ne fera qu’accroître la crise du logement en France.

Non seulement, parce que la location meublée, qu’elle soit de longue ou de courte durée, implique un suivi du bailleur beaucoup plus important qu'en location nue, notamment en ce qui concerne l’entretien et le nettoyage qui suppose des coûts plus élevés, contraintes dont les locataires sont déchargés, mais aussi et surtout, parce que, le caractère injuste de l'alignement du régime meublé sur celui du foncier revient à créer une grossière discrimination contre la location meublée, car le coût d'une location meublée est nettement supérieur à celui d'une location nue. 

Outre ces différents aspects, le projet de réforme de la députée ne tient pas compte de la situation des investisseurs qui se sont endettés, parfois sur plus de 20 ans, pour acheter des logements mis en location selon le régime fiscal du meublé.

Ces investisseurs ont pu croire que le régime fiscal resterait à peu près stable pendant la durée du remboursement du prêt, en dégageant notamment assez de trésorerie pour ce remboursement.

Or la disparition du droit de déduire l'amortissement va mettre en difficulté financière de nombreux investisseurs,

Si Bercy a créé une niche fiscale pour attirer les investisseurs dans le meublé locatif, revenir sur cette décision de manière rétroactive ne ferait qu’exacerber la perte de confiance dans la fiscalité française et sa capacité à attirer de nouveaux investisseurs.

Cette réforme pourrait donc dissuader de nombreux investisseurs potentiels et représenterait un choc fiscal majeur. Les propriétaires seraient confrontés à une augmentation significative de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux à la fois sur les loyers perçus ainsi que les plus-values à la revente du bien.

Moins d'investissements dans l'immobilier locatif signifieraient moins de logements disponibles à la location, ce qui pourrait aggraver la crise du logement.

À cela, il faut également prendre en compte le fait que beaucoup de particuliers investissent dans l'immobilier meublé pour préparer leur retraite ou pour compléter leurs revenus. Cette réforme les pénalisera lourdement, réduisant significativement leur rentabilité. Notamment, l’absence de prise en compte des propriétaires faisant du meublé en louant par bail commercial à l'exploitant d'une résidence services.

Une diminution de l'offre de logements meublés entraînera très probablement une hausse des loyers, situation qui rendra le logement encore moins accessible pour les locataires, particulièrement dans les zones tendues.

Bien sûr, les contribuables chercheront à s'adapter à la nouvelle réglementation pour essayer de conserver les mêmes avantages fiscaux, car les experts-comptables ne vont pas laisser partir leurs clients sans leur proposer des alternatives intéressantes.

En conclusion, la réforme fiscale en préparation risque de transformer profondément le paysage de l'investissement immobilier en France. 

Bien que les intentions du gouvernement puissent sembler justifiées, certains arguments reposent sur de pures croyances erronées et les conséquences pour les investisseurs et le marché locatif pourraient être considérables. 

Cette réforme, si elle est mise en place telle quelle, pourrait dissuader de nombreux investisseurs et aggraver la crise du logement en réduisant l’offre de logements disponibles, portant, par la même occasion, un coup à l’objectif de rénovation énergétique du parc.

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