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Meta, anciennement appelé Facebook, est littéralement en train de s’effondrer en bourse.

À l’heure actuelle, le prix de ses actions est passé de 382 dollars à seulement 89 dollars en l’espace d’un an, c’est-à-dire une chute de près de 77% !

Sa capitalisation boursière, c’est-à-dire la valeur de l'entreprise, est passée de plus de 1.000 milliards de dollars à seulement 238 milliards de dollars, c’est-à-dire une chute de 78%, encore une fois, en l’espace d’une seule année !

Pour couronner le tout, le Président et fondateur du réseau social, Mark Zuckerberg, a vu sa fortune s'effondrer de plus de 100 milliards de dollars depuis septembre 2021.

Comment Facebook en est-elle arrivé là ? À quel futur peut-on s’attendre et quelles pourraient être les conséquences ?

Meta : la chute remarquable d'un des GAFAM

Pour bien comprendre les raisons qui expliquent l’effondrement du prix des actions de Facebook, 3 facteurs peuvent être mis en avant : 

La hausse des taux d'intérêt

Le premier facteur expliquant la dérive de Meta a trait évidemment à la hausse des taux d’intérêt que l’on connaît actuellement autours de la planète.

De manière très simplifiée, un taux d’intérêt est l’équivalent du prix du temps : on parle de préférence temporelle

Autrement dit, en principe, tout le monde préfère avoir un billet de 100 euros dans sa poche aujourd’hui plutôt que dans un an. 

La condition pour accepter de ne pas recevoir ces 100 euros tout de suite, c’est d’obtenir une compensation pour le temps d’attente, disons être rémunéré 5 euros en plus. 

On en déduit donc que, dans ce cas de figure, le prix d’une année est de 5 euros pour attendre de recevoir 100 euros. Cela revient au même qu'un taux d’intérêt de 5 %, puisque 5 divisé par 100.

Prix x (1+taux d'intérêt)

100 x (1+0,05) = 105

Ainsi, pour accepter de ne pas recevoir ces 100 euros tout de suite mais dans un an, il faudra me donner 105 euros.

Si le taux d'intérêt n'est pas compensé alors c’est comme si le billet de 100 euros n’avait que 95 euros de valeur. 

Ainsi lorsque les taux d'intérêt augmentent, le prix du temps devient plus cher ce qui va nécessairement avoir des implications sur la valorisation des entreprises.

Dans le cas de Facebook si l’entreprise prévoyait de gagner 100 dans un an et que les taux d’intérêt se trouve actuellement à 2 %, cela veut dire qu'en actualisant les 100 euros de bénéfices, la valeur de l’entreprise pour dans un an est de 100 euros divisés par 1 plus 0,02, ce qui donne 98 euros.

100/(1+0,02)= 98

Maintenant, s’il s’avère que les taux remontent à par exemple 5 %, alors, même si les gains restent stables, c’est-à-dire que l’entreprise continue de prévoir un gain de 100 euros dans un an, le prix du temps a augmenté : le temps coûte plus cher qu’auparavant.

Dans cette situation, la valeur de l’entreprise passera à 95 euros, puisque 100 divisés par 1 plus 0,05.

100/(1+0,05)= 95

On voit donc que, lorsque les taux d'intérêt augmentent, la valeur boursière de la plupart des entreprises a tendance à baisser car leurs bénéfices futurs sont actualisés de manière plus agressive.

Dans cet exemple théorique, le prix de l’action passe de 98 euros à 95 euros, ce qui suppose une baisse de 3% de la valeur de l’entreprise.

Pour autant, l’entreprise Facebook n’a évidemment pas chuté de seulement 3%, raison pour laquelle il existe également un deuxième facteur expliquant ses déboires.

Vers une récession

Le deuxième facteur a trait aux perspectives d'une récession ou d'un ralentissement économique susceptible de porter atteinte aux revenus du groupe. Nous parlons plus en détail de sujet dans cet article.

En effet, bien que le nombre d’utilisateurs du réseau social continue d’augmenter, et que, globalement, les applications du groupe Meta, font parties des applications les plus téléchargées, le chiffre d’affaires de l’entreprise stagne. En plus de cela, son résultat net a chuté de 36% passant de 29 milliards de dollars à 18,5 milliards de dollars.

Le même schéma s’observe pour les trois derniers mois avec un chiffre d’affaires qui diminue de 4 % et un résultat net divisé par 2.

L’entreprise explique la chute de ces revenus par un effet de change, c’est-à-dire le fait que le dollar se soit revalorisé par rapport au reste des devises internationales.

Sans cet évènement, Meta explique que leur chiffre d’affaires aurait été de 1,79 milliards de dollars plus élevé.

Malgré tout, l’équipe de direction a également mis en avant  la faible demande publicitaire. Et il faut bien rester conscient que, 98 % des revenus de Facebook proviennent des publicités !

Cela est d’ailleurs également le cas de Google, dont les revenus publicitaires représentent environ 80 % du chiffre d’affaires et dont les actions se sont également cassées la figure compte tenu des incertitudes économiques futures.

Le Métavers en échec

Finalement, le troisième facteur est lié au développement du metavers.

Mark Zuckerberg s’est vu dans l’obligation de se réinventer, de donner un nouveau coup de boost à Facebook compte tenu de la concurrence qui fait rage, notamment avec TikTok, qui est littéralement en train de lui voler des parts de marché.

En effet, si l’on part du principe que le business model de ces différentes plateformes est de capter l’attention des utilisateurs, la concurrence est extrêmement rude puisque si un réseau social parvient à attirer l’attention d’un utilisateur alors ce même utilisateur consomme nécessairement moins de contenu du réseau social concurrent.

Il s’agit d’un business model radicalement différent de celui implémenté par les entreprises qui vendent des biens. Par exemple une personne peut consommer chez différentes entreprises en fonction de son pouvoir d’achat.

Avec les réseaux sociaux, il s’agit de consommer de notre temps d’attention. Or, notre temps est limité, tandis que notre pouvoir d’achat peut-être augmenté !

Ainsi, TikTok vole des parts de marchés de Facebook, sans compter que le réseau social de Zuckerberg devient de plus en plus un réseau pour des personnes d’un certain âge, tandis que TikTok attire des profils de consommateurs bien plus jeunes.

En ce sens, pour éviter de disparaître ou devenir un réseau social d’une faible importance, Zuckerberg a souhaité réinventer l'entreprise à travers le développement du metavers. Or, non seulement ce développement est coûteux mais en plus, il est particulièrement incertain

Ainsi, si comme vu précédemment, le résultat net, de Facebook sur les neuf premiers mois de l'année ont chuté par rapport à l’année dernière, c’est précisément parce que les dépenses ont augmenté !

Comme on peut le voir, les dépenses de recherche et développement se sont envolées de 49 et 45% sur les trois et 9 derniers mois de l’année, respectivement.

Or, ces dépenses, démontre à quel point Facebook a plus que jamais besoin de se réinventer, d’autant plus que, pour le moment, le metaverse ne rapporte aucun bénéfice.

Tout cela vient chambouler complètement le business model originel du réseau dont les sources de revenus étaient jusqu’à présent plutôt stables et prévisibles.

Les différents profils d'investisseurs

S’il est vrai que Mark Zuckerberg n’a pas d’autres choix que de prendre des risques en développant de nouvelles solutions, il ne faut pas oublier qu’il a réalisé un paris qui pourrait lui coûter extrêmement cher !

En effet, il est en train de mélanger au sein d’une même entreprise des profils d’investisseurs totalement différents.

Tous les investisseurs actionnaires de Meta n'ont pas nécessairement la même tolérance au risque : certains sont des investisseurs plutôt conservateurs, c'est-à-dire ils achètent des actions d’entreprises solides, “garantissant” une performance régulière sans prendre trop de risques. D’autres sont des investisseurs téméraires qui parient sur des entreprises naissantes, qui ont besoin de faire leurs preuves.

Et, évidemment, ces deux profils de risque n’ont strictement rien à voir et donc, en principe, ils n’ont aucune raison d’acheter les mêmes actions. Or, avec ce qu’a fait le CEO de Facebook, des actionnaires qui, à la base, sont censés être plutôt conservateurs et avoir un profil prudent, se retrouvent à investir dans une quasi startup

En effet, jusqu’à présent Facebook a généré énormément d’argent et en plus le groupe avait choisi stratégiquement de ne pas verser de dividendes et préférait utiliser une partie de cet argent dans le rachat de ses propres actions.

C’est donc pour cette raison que jusqu’en mars de cette année, Meta possédait près de 40 milliards de dollars dans ses caisses.

Sauf que tout à coup, le CEO de Facebook s’est mis à procéder à un virage à 180 degrés chamboulant totalement le profil de la société qui devient littéralement une startup.

Désormais, Meta n’est plus une entreprise dédiée à toucher des revenus d’annonceurs pour accroître ses bénéfices et donc ceux des actionnaires, mais plutôt une entreprise qui va utiliser une grande partie de ses bénéfices pour développer un projet dont l’issue est incertaine.

D’ailleurs, depuis le début de l’année, le groupe a déjà cramé plus de 10 milliards de dollars, soit un quart de sa trésorerie !

Ainsi, les anciens actionnaires généralement conservateurs, ne souhaitant pas nécessairement prendre autant de risque, se mettent à liquider leurs positions.

Cela ne veut évidemment pas dire que Mark Zuckerberg n'aurait pas dû faire ce pari. Il s’agit là d’une autre question, simplement qu’il aurait probablement été plus intelligent de faire ce que l’on appelle un “spin-off”, c’est-à-dire créer une nouvelle entité issue et séparée d'une entreprise plus grande, dédiée au développement d'une activité nouvelle et innovante.

Cela aurait permis de développer le metavers, sans mélanger les activités qui n’ont strictement rien à voir.

Pour terminer, d’après ce que l’on vient de voir, on en déduit donc que la valeur de toute entreprise, au-delà de ses fluctuations de prix quotidiennes s’explique par 3 éléments :

  1. L’évolution des taux d’intérêt (et qui aujourd’hui augmentent)
  2. Les bénéfices futurs espérés d’une entreprise (qui sont en chute pour le cas de Méta)
  3. La durée d’attente avant la matérialisation des bénéfices qui rajoute en plus une part d’incertitude (dans le cas de meta elle se rallonge encore plus compte tenu du développement du metaverse)

En finance on dit  que la valeur d’une entreprise est équivalente à la somme actualisée de ses flux de revenus futurs. Autrement dit, une action vaut donc ce que nous espérons qu’une entreprise gagnera sous forme de bénéfices à long terme en actualisant ses bénéfices futurs attendus au taux d'intérêt actuel sur le marché.

Ainsi, si les investisseurs s’attendent à ce que les bénéfices futurs d’une entreprise chutent et/ou que les taux d’intérêt montent et/ou que les bénéfices ne se matérialisent qu’au bout de nombreuses années, alors, on observera une baisse de la valeur de l’entreprise.

On parle d’ailleurs de DCF ou Discounted Cash Flow pour se référer à cette méthode d’évaluation et elle est généralement représentée au travers de la formule suivante : Va = Cf/(1+î )^t

Au vu de la formule, on en déduit donc que, plus les bénéfices futurs sont élevés, plus les taux d’intérêt sont bas et plus les bénéfices se matérialisent rapidement, mieux ce sera pour l’entreprise.

Si on reprend la formule précédente :

 Va = Cf/(1+î)^t

  • Va représente la valeur actualisée
  • Cf la somme des cash-flow futurs
  • le tout élevé à la puissance t qui représente le temps, c’est-à-dire la durée d’attente avant que l’entreprise matérialise ses bénéfices.

Si on remplace les lettres et que l'on prend un taux d'intérêt de 2 à 5 %, pour un bénéfice de 100 euros, et que les bénéfices ne se matérialisent non pas au bout d’un an mais au bout de 10 ans, alors, le cours de l’action ne serait non plus de 95 euros, mais de 61 euros.

Cela signifie que la valeur de l’entreprise chute non plus de 3% comme vu précédemment, mais de 38%.

En général, donc, des taux d'intérêt élevés contribuent à faire baisser les prix des actions en appliquant une actualisation plus forte sur les bénéfices futurs. Plus ces bénéfices futurs espérés sont situés dans une période de temps lointaine, plus la formule d’actualisation impactera à la baisse la valeur des actions.